Echec de refinancement : ce que l’on sait à ce jour et les questions que nous posons.

Cher Actionnaire,

Une communication minimale sur le site internet d’ANTALIS pour une opération d’importance en montant et pour sa stratégie.

Deux communiqués de presse (sur le site officiel) :

30 juin 2017 : "ANTALIS International annonce aujourd’hui son intention de placer, sous réserve des conditions de marché, un montant en principal de 325 millions d’euros d’obligations garanties à échéance 2024. Les fonds levés dans le cadre du placement de ces Obligations seront affectés au remboursement de toutes sommes dues au titre du contrat de crédit existant ainsi qu’au paiement des frais et dépenses relatifs à l’opération, aux besoins en fonds de roulement en remplacement d’une partie des programmes d’affacturage et aux besoins de financement d’ANTALIS en général."

7 juillet 2017 : "En raison des conditions de marché, ANTALIS a décidé de reporter son émission obligataire sous forme de « high yield notes »."

Ce projet de restructuration de la dette d’ANTALIS était toutefois déjà annoncé lors de l’introduction en bourse d’ANTALIS – document de référence -

  • Page 43 : "ANTALIS étudie activement ses options de refinancement qu’elle envisage de mettre en place au 2nd semestre 2017"
  • Page 44 : "Désendettement naturel permettant d’atteindre un niveau d’Endettement financier net / EBITDA en fin d’année inférieur à 2,5x (avant acquisitions)"
  • Page 52 : "Endettement net & plan de refinancement ;
    Diversification des ressources financières d’ANTALIS :
    • Programmes d’affacturage de 200M€ (échéance en déc 2018) : 145M€ tirés au 31 déc 2016
    • Contrat de Crédit Syndiqué de 310M€ (échéance en déc 2018) : 237M€ tirés au 31 déc 2016 Endettement net à 254M€ au 31 déc 2016 (vs 232M€ au 31 déc2015) :
      • Ratios Levier financier (Dette nette / EBITDA) = 2,9x (≤ 3,35x)
      • Ratio de couverture des intérêts (Résultat Opérationnel Courant / Charges d’Intérêts Nettes) = 4,2x (≥ 2,30x)
      • Covenants financiers des programmes d’affacturage alignés sur ceux du contrat de crédit"

  • Commentaires ASAMIS : Les lignes de crédit autorisées ne sont pas utilisées au maximum. Les ratios d’endettement sont corrects par rapport à l’EBITDA (revenus d'une entreprise avant soustraction des intérêts, impôts, dotations aux amortissements et provisions sur immobilisations) ou au résultat opérationnel courant.

Décryptage pour comprendre « High yield notes » ou emprunts à haut taux d’intérêt aussi appelés Junk bonds

L’emprunt obligataire projeté par ANTALIS aurait été à haut taux d’intérêt et donc assimilé à un « junk bond » qu’on traduit couramment par « obligation pourrie ». L’emprunteur admet de payer un haut taux d’intérêt en contrepartie du risque élevé qu’assume le prêteur. Ce taux peut aller jusqu'à 1000 points de base = 10% de plus que le taux d'intérêt de l'emprunt d'état du pays émetteur !.

Ces obligations sont qualifiées de spéculatives par les grandes agences de notation internationales lorsqu’elles ont une cotation inférieure ou égale à BB+ (Ba1 pour Moody's). Pour ANTALIS la cotation était bien en dessous : BA3

ANTALIS retire sa vente d’obligation à haut taux d’intérêt (Article du Financial Times 7 juillet 2017, traduit par l'ASAMIS)

ANTALIS International a retiré du marché vendredi son offre d’un placement d’obligations pourries - junk bond - après que les investisseurs aient demandé un rendement supérieur à ce que la société était disposée à payer. Ce fut la première vente d’obligation pourrie en euros de l’année a échouer.

La société française cherchait à lever 325 millions depuis lundi sous forme d’obligation à 7 ans pour refinancer ses prêts à court terme et en avait fait la promotion depuis lundi. Le vendredi après-midi, la société a annoncé qu’elle reportait la vente "en raison des conditions du marché".

Alors qu’un certain nombre d’obligations européennes à haut rendement ont été repoussées par les investisseurs récemment, des observateurs bien informés ont dit que c’était le premier échec de vente d’obligations pourries en euros cette année. Les Etats-Unis ont vu un couple de rejets de placements d’obligations à haut rendement dans les semaines écoulées, ceux d’une société de réseaux câblés Charter Communications et de la société minière Hecla.

Alors que la société a attribué l’échec de l’opération aux conditions du marché, les investisseurs ont dit que l’opération était une vente difficile pour plusieurs raisons.

ANTALIS agit comme pur intermédiaire, ce qui signifie qu’elle n’a pas d’actifs réels à proprement parler – principalement dans l’industrie du papier, où les marges de l’entreprise ont été sous pression ces dernières années. Le propriétaire principal, SEQUANA, récemment en difficulté financière, a dû introduire en bourse une part d’ANTALIS le mois dernier pour sortir du plan de sauvegarde – une procédure française de protection contre la faillite.

Bien qu’ANTALIS ne soit pas concernée par la procédure de faillite de sa société mère, les deux entreprises SEQUANA et ANTALIS International sont des sociétés étroitement liées puisque SEQUANA possède aussi les sociétés auxquelles ANTALIS vend le papier. (Note ASAMIS : Le FT fait une erreur. Il aurait dû écrire qu’ANTALIS achète le papier à SEQUANA entre autres fournisseurs. Cette grave confusion montre qu’ANTALIS a pâti de ses liens avec SEQUANA )

Plusieurs investisseurs ont également souligné que les prêts qu'ANTALIS cherchait à refinancer ont été cotés à des prix en détresse sur le marché secondaire jusqu’à récemment, où les marges sur l’euro ont été aussi basses que jusqu’à 65 cents (Note ASAMIS : 0,65%) aussi récemment qu’en juin.

Les investisseurs ont déclaré que le gestionnaire principal de l’opération, Goldman Sachs, a commencé à commercialiser l'offre avec des rendements autour de 6,5%, mais avait dû les revoir à la hausse après les rejets d'acheteurs potentiels.

Source : texte original du FINANCIAL TIMES - 7 juillet 2017 par Robert Smith

ANALYSE de l’ASAMIS et QUESTIONS

La pérennité d’ANTALIS n’est pas impactée par l’échec du plan de refinancement mais la crédibilité des dirigeants est en cause.

Les dirigeants de SEQUANA – ANTALIS ont subi un échec imputable non seulement au marché comme ils le laissent entendre mais aussi de par leur stratégie.

Les investisseurs potentiels à New York ont constaté qu’ANTALIS restait dépendante de SEQUANA, or vu des Etats-Unis, celle-ci est considérée comme une entreprise défaillante puisqu’elle a recouru à une procédure judiciaire pour se protéger de ses créanciers (BAT).

L’introduction en bourse n’a pas produit l’effet de valorisation espéré, c’est le moins qu’on puisse dire puisque le cours se trouve 33% en dessous du nominal.

Au-delà, la mise sur le marché de seulement 18,4% du capital n’a pas permis de renégocier la dette d’ANTALIS dans des conditions acceptables.

Cet échec pose des questions que nous comptons transmettre à la direction :

  1. Sur l’opportunité de l’opération : GOLDMAN SACH connait les marchés et implique son standing sur ce genre d’intervention. Elle n’a pu que prévenir les dirigeants des risques d’échec, pourquoi sont-ils passés outre ?

  2. Sur le coût pour ANTALIS : des commissions importantes sont prises par les banques pour ce genre d’opération : A combien se chiffre l’addition ? Quel aurait été le gain financier si le placement obligataire avait réussi à un taux de 6,5% ?

  3. Sur la stratégie alternative. Du fait de la rentabilité au T1, du poids acceptable des frais financiers, les lignes de factoring et autres facilités de crédit n’ont pas de raison d’être menacées. Quels taux sont appliqués ? (les taux donneront une indication du standing estimé par les banques à ANTALIS). Quelle est la maturité des dettes ? Certaines dates d'échéance ont-elles été renégociées récemment ? Nous avons été informés qu'Antalis et les parties au programme d'affacturage ont signé un accord afin notamment d’étendre la maturité du programme du 31 décembre 2018 au 30 mars 2020 (soit un allongement de 15 mois) et de modifier certaines dispositions dont les covenants. Y-a-t-il d'autres renégociations envisagées ? Est-ce qu’une opération financière alternative de refinancement est envisagée ?

L’ASAMIS demande un rendez-vous pour vous éclairer en retour sur ce fiasco qui a encore affaibli le standing financier d’ANTALIS.

Cordialement,
L'équipe de l'Asamis

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