SEQ : Intervention du 13 février à l'Assemblée nationale pour Arjowiggins

Intervention du 13 février à l'Assemblée nationale pour Arjowiggins

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M. le président. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Monsieur le Premier ministre, à Jouy-sur-Morin, en Seine-et-Marne, nous assistons à la mort programmée d’une filière industrielle française. Arjowiggins Security était, jusqu’à une période récente, un leader mondial et une référence ; ses ouvriers possèdent un savoir-faire et une technicité reconnus dans le monde entier. L’État, via BpiFrance, la Banque publique d’investissement, a injecté, tenez-vous bien, 250 millions d’euros, depuis cinq ans, dans l’entreprise Sequana.

Comment, dans ces conditions, a-t-on pu laisser cette entreprise aux mains d’un fonds voyou, avec la bénédiction des services de Bercy ? Ce fonds aurait été jusqu’à détourner les sommes versées par les salariés pour leur mutuelle de santé !

M. Fabien Di Filippo. Rendez l’argent !

M. Christian Jacob. Face à une telle entreprise de destruction d’une force industrielle, nous n’avons pas le droit de nous taire, monsieur le Premier ministre. Avec les salariés, nous sommes convaincus qu’un avenir existe pour une filière papetière, notamment dans le domaine fiduciaire. C’est aussi une question de souveraineté nationale. Allons-nous cesser de fabriquer en France le papier nécessaire à nos cartes grises, à nos cartes d’identité, à nos passeports ?

J’ai échangé, et continue de le faire, avec les ministres de l’économie et du travail. Mais il est maintenant de votre responsabilité, monsieur le Premier ministre, de prendre le sujet à bras-le-corps. Les 240 salariés et leurs familles sont aujourd’hui sur le carreau, sans aucune perspective.

J’ai cru comprendre que, ces derniers jours, vous n’étiez avare ni de déplacements, ni de débats. Je vous demande donc de venir en personne, sur place, sur le site de l’usine, à la rencontre de ses 240 salariés (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOC et parmi certains députés non inscrits) et d’élaborer avec eux, avec les services de l’État, une stratégie industrielle.

Vous montreriez ainsi à ces salariés, dont le comportement a été exemplaire, que l’État et vous-même les considèrent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe SOC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Vous avez appelé mon attention, monsieur le président Jacob, sur la situation du site d’Arjowiggins Security à Jouy-sur-Morin, qui a été placé en liquidation judiciaire le 30 janvier dernier. Vous avez rappelé la qualité de la production, l’engagement des salariés pour soutenir leur « boîte » et les efforts qu’ils ont même consentis pour maintenir l’activité : je n’y reviens pas, mais j’en ai conscience.

Je vous rejoins aussi sur l’autre aspect de votre question : cette production, qui concerne l’ensemble des papiers sécurisés, est donc en lien étroit avec une partie de la souveraineté française.

M. Jean-Paul Lecoq. Encore des patrons voyous !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Arjowiggins Security, ancienne filiale du groupe papetier Sequana, emploie 265 salariés, dont environ 220 – vous avez dit 240 – sur le site de production de Jouy-sur-Morin. Vous le savez, elle fut cédée en avril 2018 par Sequana au groupe Blue Motion Technologies Holding, détenu par un fonds germano-suisse, Parter Capital Group.

M. Thibault Bazin. Des voyous !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Dans ce cadre, le repreneur s’était engagé, devant le tribunal, à limiter les suppressions d’emplois et à soutenir Arjowiggins Security dans ses efforts de modernisation et de recherche de nouveaux marchés. Il s’est également engagé à subvenir aux besoins de financement des opérations par le biais d’instruments bancaires divers, notamment des garanties. Ce sont ainsi 7 millions d’euros qui devaient être levés.

Or, quelques mois à peine après la reprise, il apparaît que Blue Motion Technologies Holding n’a proposé aucun plan industriel crédible, refusant de débourser le moindre euro pour redresser une situation financière très dégradée. Vous avez souligné les efforts consentis par l’État et l’attention prêtée, y compris par les membres du Gouvernement, à l’avenir de ce site industriel auquel nous sommes attachés.

Nous devons la vérité à votre assemblée, ne nous voilons pas la face : la situation de l’entreprise, s’agissant en particulier de l’avenir des salariés, est extrêmement délicate. Si vous m’interrogez à son sujet dans votre enceinte, au reste, c’est bien parce que vous avez conscience qu’elle l’est.

Il nous faut donc procéder à des vérifications et réfléchir dans le détail, avec les ministres compétents, qui ont évidemment toute ma confiance, et l’ensemble des administrations et des opérateurs de l’État, qui peuvent venir en soutien à ces opérations, à la meilleure solution au regard des sombres perspectives auxquelles l’entreprise doit faire face.

Je prends votre invitation au mot, monsieur le président Jacob, et m’engage à faire en sorte que l’État soit totalement mobilisé – il l’est déjà, d’ailleurs, vous ne l’avez pas nié – pour trouver, quelles que soient les circonstances, la meilleure solution. Je vais m’y employer personnellement. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM, MODEM et LR.)

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