Série : « Un abus de minorité ! » – S01E04 – Le verrouillage de la gouvernance : quand les minoritaires n’ont plus voix au chapitre

Épisode 4 – Le verrouillage de la gouvernance : quand les minoritaires n’ont plus voix au chapitre

Introduction : Gouvernance et Valorisation, un Lien Direct

Après avoir analysé la prise de contrôle progressive de MBWS par la COFEPP et la gestion controversée de sa trésorerie excédentaire, un constat s’impose : le cœur du problème est désormais celui de la gouvernance. Cette dernière est un facteur direct de valorisation : toutes les études convergent — selon l’AMF, l’OCDE et plusieurs travaux académiques, les entreprises dotées d’un conseil d’administration équilibré et transparent bénéficient en moyenne d’une prime de valorisation de 10 à 15 % par rapport à leurs pairs moins bien gouvernés. À l’inverse, une gouvernance verrouillée engendre une prime de risque, qui se traduit inéluctablement en décote boursière.

Or, le Document d’Enregistrement Universel (DEU) 2024 le montre clairement : MBWS compte seulement 2 administrateurs indépendants sur 10 (20 %), bien en deçà du tiers recommandé par le Code Middlenext. Ce déficit de contre-pouvoir fragilise la société et alimente la méfiance des investisseurs. C’est le paradoxe explosif d’une entreprise dotée de marques puissantes et de réserves de cash, mais dont la gouvernance verrouillée empêche toute création de valeur pour les actionnaires.

Daniel Pichot, président de l’ASAMIS, et David Meurisse, représentant du Concert MBWS, décortiquent ce mécanisme de dévalorisation.

1. Le Conseil d’Administration : Une Surreprésentation Verrouillée

David Meurisse (Concert MBWS) : Le Concert MBWS détient aujourd’hui plus de 10 % du capital. Dans toutes les bonnes pratiques de gouvernance, une telle position justifie amplement un siège au Conseil d’Administration. Nous le répétons encore une fois, notre objectif n’est pas de bloquer, mais d’apporter une contribution constructive à la stratégie et de garantir une surveillance équilibrée.

Daniel Pichot (ASAMIS) : Pourtant, cette demande a été rejetée lors de la dernière AG. Trois candidats avaient été proposés, dont un indépendant, mais la majorité a refusé la résolution. Une décision d’autant plus choquante que Diana Holding, avec seulement 3,5 % du capital, conserve deux sièges. L’un d’eux, occupé par Mme Rita Zniber, est d’ailleurs resté régulièrement vacant : son absence récurrente aux conseils et aux assemblées est constatée depuis plus de deux ans.

David Meurisse : Cette asymétrie illustre un verrouillage difficile à justifier. On assiste à une négation du droit élémentaire des actionnaires qui détiennent 10 % du capital, au profit d'une surreprésentation inactive. Ce type de situation envoie un signal négatif aux marchés et contribue à une décote injustifiée de la valeur de MBWS.

Daniel Pichot : N’est-ce pas la mainmise de la COFEPP sur le Conseil qui est le signe le plus évident, et le principal responsable, de la faible valorisation boursière de MBWS ?

David Meurisse : Sur 10 administrateurs, 6 sièges sont occupés par la COFEPP ou ses proches (M. Jean-Pierre Cayard, Mme Edith Cayard, Mme Sylvia Bernard, Mme Anna Luc, M. Cyril Cahart), 2 sièges par Diana Holding (M. Hachem Belghiti, Mme Rita Zniber), et seulement 2 sièges par des indépendants (M. Guillaume de Belair, M. Jacques Tierny). Le résultat est sans appel : 80 % du Conseil est aligné sur la maison-mère, réduisant MBWS à une chambre d’enregistrement des décisions prises ailleurs. Ce cadenassage bloque toute évolution positive du cours de bourse de l’action MBWS.



2. Le Contrôle Opérationnel : Juge et Partie dans les Comités

Daniel Pichot : Cette concentration de pouvoir ne se limite pas au Conseil d’Administration. Elle s’étend de manière significative aux comités les plus sensibles, où se jouent pourtant les arbitrages stratégiques.

Le Comité d’Audit : Quand le Contrôleur est aussi Contrôlé

Daniel Pichot : Les chevauchements sont flagrants. Le Comité d’Audit est censé garantir la sincérité des comptes. Il est l’organe clé pour prévenir les conflits d’intérêts. Mais sa composition envoie un signal inquiétant : M. Jacques Tierny (président et indépendant) ; M. Guillaume de Belair (indépendant) ; et M. Jean-Pierre Cayard ( actionnaire majoritaire de la COFEPP qui est depuis 2019 actionnaire majoritaire de MBWS). A noter que M. de Belair et M. Cayard sont membres de ce comité depuis 2015 et ont manqué à leur devoir de vigilance pour faire renforcer la surveillance de la filiale Polonaise qui a subi une escroquerie estimée à 23 M€. La plainte déposée le 9 aout 2018 devant le procureur de Katowice par 10 salariés de MBWS Polska et qui dénonçait cette escroquerie de 2015 à 2017, a manifestement été occultée sous une soi-disant « opération promotionnelle ». Seul le DG Jean-Noël Reynaud a été remercié en mars 2018. Les membres du comité d’audit ont été maintenus.

David Meurisse : La présence de M. Jean-Pierre Cayard est en soi problématique au regard de l’article L. 22-10-12 du Code de commerce. M. Jean-Pierre Cayard est à la fois l’actionnaire qui concentre le pouvoir et le membre du comité censé contrôler la qualité des flux financiers dont les flux intra-groupes. Il est juge et partie, et cela même si MBWS affirme que la présence d’un président administrateur indépendant permet à M. Jean-Pierre Cayard de ne pas participer à l’évaluation des conventions auxquelles la COFEPP est intéressée. Il n’en demeure pas moins que le dirigeant du groupe majoritaire contrôle directement l’organe censé surveiller les états financiers de la filiale. Ce conflit d’intérêts potentiel est manifeste et fragilise la crédibilité du contrôle.

Le Comité Stratégique et Commercial : Un Verrouillage Familial en Écart avec le Code Middlenext

Daniel Pichot : Le verrouillage se prolonge au sein du Comité Stratégique et Commercial (CSC). Ce comité est présidé par M. Cyril Cahart, directeur général de La Martiniquaise (groupe COFEPP). À ses côtés siègent : Mme Edith Cayard (épouse de Jean-Pierre Cayard ) ; Mme Sylvia Bernard (fille de J.-P. Cayard) ; et M. Hachem Belghiti (Diana Holding).

David Meurisse : En clair, il n’y a aucun indépendant mais une majorité absolue de représentants du groupe familial COFEPP. Les arbitrages stratégiques de MBWS — choix d’investissements, orientations de marques, priorités commerciales — sont donc confiés à une instance dont la majorité écrasante est directement liée à la maison-mère. Cette situation contrevient à l’esprit même des recommandations du Code Middlenext, notamment la Recommandation R7 qui exige que la présidence soit confiée à un membre indépendant, ce qui nourrit un climat de défiance et alimente sans aucun doute la décote boursière.



3. Conventions Réglementées : Le Risque de Transfert de Valeur et le Jackpot Manqué / Tentative de déstabilisation (Cas Angus / Glen Turner)

Daniel Pichot : Ces déséquilibres de gouvernance ne sont pas des arguties juridiques ; ils se traduisent directement en cash et en marge dans la gestion des conventions réglementées, qui structurent pourtant les prix de revient des ventes de MBWS. Le problème de ce verrouillage n'est pas abstrait, il se chiffre en millions d’euros Les conventions réglementées d'achat de bulk (whisky de base) sont l'instrument du risque, mais aussi d'une belle opportunité de création de valeur.

David Meurisse : Actuellement, le contrat historique avec Angus Dundee (fournisseur de bulk qui représente 75 % des volumes de William Peel) est devenu désavantageux et coûteux, tandis que le contrat avec Glen Turner (filiale COFEPP, 25 % des volumes) est plus compétitif. L'actionnaire majoritaire prépare logiquement la bascule stratégique vers Glen Turner après 2027.

Daniel Pichot : En effet, le contrat Angus, conclu il y a plus de dix ans, comportait une structure tarifaire qui, si elle pouvait paraître favorable au départ, devient de moins en moins compétitive à mesure qu’on approche de son terme. Aujourd’hui, MBWS paie donc son whisky de base à un prix défavorable. Ce qui est troublant dans le contenu de ce contrat, c’est que Jean-Pierre Cayard en a personnellement renégocié les termes avant même la montée en puissance de la COFEPP dans le capital de MBWS.

David Meurisse : L'Autorité de la concurrence a d’ailleurs sanctionné la COFEPP pour cette ingérence ! Je cite la Décision n° 22-D-10 du 12 avril 2022 : « COFEPP est intervenue directement dans la politique commerciale de MBWS, en particulier en cherchant à renégocier le contrat liant MBWS à son principal fournisseur de whisky, Angus Dundee. À ce titre, le président du directoire de COFEPP est allé jusqu’à engager à partir de juillet 2018 des négociations directes avec le dirigeant d’Angus Dundee. » Cette intervention, qui a précédé la dégradation des prix d'achat de MBWS, rend le contenu du contrat Angus encore plus opaque et suspect. Le Concert MBWS s’il était administrateur s’intéresserait aux termes de ce contrat à prix progressif et se demande quelles ont été les contreparties contractuelles de cette progressivité.

Daniel Pichot : Cela reste un mystère pour nous ! Mais ce que je peux affirmer avec certitude malgré l’ensemble des démentis et des allégations de mauvaise interprétation soutenues par MBWS, c’est que, lors d’un déjeuner en janvier 2025 avec M. Jean-Pierre Cayard, ce dernier m’a indiqué qu’il envisageait d’aligner les prix de Glen Turner sur ceux d’Angus. Donc augmenter les prix sur la partie Glen Turner de x% avec une conséquence directe de dégradation de la marge de WP/MBWS.

David Meurisse : En effet suite à votre déjeuner avec M. Jean-Pierre Cayard, j’ai décidé d’écrire au nom du concert au président du conseil d’administration de MBWS pour lui relater les propos ci-dessus. MBWS nous a répondu que ces propos avaient été « mal compris par M. Daniel Pichot » et que ce sujet n’était pas « à l’ordre du jour ». Toutefois si ce scénario se concrétisait, cela signifierait que la bascule se ferait sans mise en concurrence réelle, en maintenant la COFEPP en position de force et que le gain de marge potentiel pour MBWS serait volontairement limité. Or, nos analyses montrent que les prix pratiqués par le contrat Angus, s'ils ne sont pas renégociés, représentent un surcoût annuel massif pour la filiale. Si d’aventure la COFEPP intervenait de manière assumée sur le prix de la renégociation, nous serions confrontés à un gros problème de valorisation boursière de MBWS.

Daniel Pichot : En effet, en limitant de manière assumée le gain de marge, on assisterait de facto à un transfert net de valeur de MBWS vers sa maison-mère via une simple modification contractuelle intra-groupe. MBWS continuerait d'acheter à des conditions sous-optimales, tandis que la marge, au lieu de revenir aux actionnaires de MBWS, irait désormais directement à une société détenue par l’actionnaire majoritaire. Ce serait un manque à gagner structurel !

David Meurisse : C’est exact ! Et nous savons également que le simple fait de passer à un prix Glen Turner normal pour l'intégralité du volume nous apporterait un gain de marge immédiat d’au moins +12,8 % sur l'achat du bulk par rapport aux conditions actuelles d'Angus. Et ça, c’est MBWS elle-même qui le revendique : « Les prix pratiqués par Glen Turner sont systématiquement inférieurs à ceux pratiqués par le fournisseur externe et ce, sur quatre exercices consécutifs, avec des écarts de prix de plus en plus significatifs (- 12,8 % en 2024 ; - 6,3 % en 2023 ; - 3,2 % en 2022 ; - 3,8 % en 2021). Glen Turner est donc plus compétitive que cet autre fournisseur alors même que Marie Brizard lui achète des volumes en moyenne inférieurs. » En termes de valorisation du titre MBWS, c’est une excellente nouvelle.

Daniel Pichot : En effet, un approvisionnement dans ces conditions financières portant sur la totalité des besoins en whisky dégagerait un EBITA positif supplémentaire conséquent pour MBWS. On est donc en droit de se demander pourquoi une nouvelle négociation tarifaire sur les conditions d’achat du bulk n’a pas encore été entamée.

David Meurisse : Si MBWS communique aisément sur la date de début du contrat Angus, elle a toujours refusé de  donner des précisions sur sa date de fin, ce qui permettrait pourtant d’anticiper une date de renégociation de ce contrat crucial. À la dernière AG sur le sujet, MBWS a même invoqué « le secret des affaires » pour éluder la question. Tout se passe comme si MBWS manifestait une volonté inébranlable d’étouffer les événements positifs pour la valorisation boursière de son titre tout en insistant sur les impacts des facteurs défavorables. Cependant, deux sources proches du dossier nous ont confirmé la date de 2027.

Daniel Pichot : Et c’est bien là que se situe la première pierre d’achoppement. Fin 2025, MBWS affirmait que : « Glen Turner offrant des conditions tarifaires plus avantageuses, Marie Brizard a progressivement augmenté ses achats auprès de ce fournisseur, qui a pourvu à 24,7 % de ses besoins en whisky en 2024 (contre 13,4 % en 2021). » Ce qui tend à confirmer les propos de M. Jean-Pierre Cayard sur une lente substitution du fournisseur Angus par Glen Turner (COFEPP) sans aucun mécanisme d’appel d’offre officiel ni de révision des conventions soi-disant « normale » entre sociétés liées.

David Meurisse : Il faut reconnaître que la stratégie, bien que sournoise, est redoutablement efficace. En fait, MBWS ne se sent pas tenue de respecter le mécanisme car elle considère que : « Ces conditions favorables d’approvisionnement (auprès de Glen Turner) étant convenues entre deux entités sœurs aux intérêts concordants, le Contrat d’approvisionnement n’a pas à être qualifié de convention réglementée… et que cette opération de gestion est parfaitement conforme à son intérêt social. »

Daniel Pichot : Circulez, il n’y a rien à voir ! MBWS semble totalement ignorer le droit des minoritaires. Une expertise de gestion paraissait être une solution à cette problématique.

David Meurisse : Notre première tentative judiciaire sur le sujet s’est même soldée, à cause du manque d’éléments matériels soutenant notre cause, par un statu quo. Cette décision a eu le goût amer d’une prime à l’opacité, MBWS faisant valoir : « Une tentative d’une minorité de concertistes non déclarés d’obtenir une expertise de gestion afin d’inciter la COFEPP à racheter leurs titres. » Mais la démarche nous a malgré tout permis de glaner un ensemble d’informations que nous n’aurions jamais obtenues par ailleurs. Elle a mis en lumière une volonté irrépressible de la COFEPP à utiliser tous les outils à sa disposition afin de maintenir une sous-évaluation chronique du titre MBWS. Mais le Concert MBWS veut envoyer aujourd’hui un message clair : Jamais nous n’accepterons l’usage de stratégies volontaires de sous-évaluation.

Daniel Pichot : Ne devrions-nous pas viser haut ? Une simple mise en concurrence orchestrée par un comité indépendant — opposant Glen Turner, Angus, et au moins un troisième acteur majeur du marché — amènerait un changement de paradigme financier !

David Meurisse (Concert MBWS) : Depuis des mois, les distilleries de whisky font face à une diminution drastique de leurs volumes de ventes. Elles accumulent inexorablement les stocks de bulk et cherchent désespérément à écouler leurs excédents. Les contraintes du vieillissement les obligent de surcroît à libérer de la place dans les chais. Conséquence : elles sont prêtes à négocier des contrats long terme à des conditions tarifaires exceptionnellement favorables à l’acheteur.

Les experts sont unanimes : 2027 sera une année charnière pour la renégociation des contrats d’achat de bulk. Ces informations sont toutes fraiches puisqu’elles émanent de l’un de nos référents présents au salon des spiritueux de Berlin qui se tenait début octobre.  Ils estiment qu’une négociation bien menée — de manière compétitive et sans conflit d'intérêts — pourrait dégager une marge additionnelle de plusieurs millions d'euros par an, surpassant même les meilleures conditions obtenues actuellement sur le marché. Nos contacts en coulisse le confirment : Angus, conscient de perdre un marché aussi important pour leur société familiale, serait prêt à des concessions  très significatives pour conserver ce volume. Ce gain de marge se traduirait immédiatement par une augmentation spectaculaire de la valorisation boursière de MBWS.

Daniel Pichot : C'est le levier de création de valeur le plus puissant que nous ayons entre les mains. L’année 2027 sera incontestablement l'année de vérité, l'année de la juste valeur de MBWS. Malheureusement, la COFEPP a rejeté notre proposition de siéger au conseil d’administration. Ce faisant, ne joue-t-elle pas un jeu potentiellement dangereux ?

David Meurisse : En mettant un voile sur les conditions de renégociation du contrat Angus, la COFEPP alimente la suspicion d’un transfert de valeur vers leur poche (en ne concédant qu'une petite partie de la marge potentielle). La tentative de déstabilisation lors de votre déjeuner avec M. Jean Pierre Cayard est un avertissement à la vigilance.  Dans le but d’apporter plus de sérénité et de loyauté dans la renégociation des conventions inter-compagnies, le Concert MBWS avait proposé la création d’un comité ad hoc composé uniquement d’indépendants, chargé de surveiller les conventions intra-groupes, mais cette proposition a été rejetée. Sans ce contrôle, rien ne garantit que la renégociation de 2027 se fasse dans l’intérêt social strict de MBWS. C’est pourtant là que se joue une part essentielle de sa rentabilité future et par conséquent de la valorisation boursière de MBWS. Cependant, nos lecteurs les actionnaires minoritaires de MBWS doivent savoir que le Concert MBWS mettra tout en œuvre pour contrôler le bon déroulement de cet appel d'offres. Et si Glen Turner remportait le contrat, nous serions extrêmement attentifs au libellé de la convention réglementée pour garantir l'équité des prix pour MBWS. Si les circonstances d’opacité persistent nous n’excluons pas non plus la possibilité et notre droit d’engager une nouvelle procédure d’expertise de gestion en 2027 ou 2028.

D’autant plus qu’ici nous parlons de la fourniture de whisky car nous disposons de signaux d’alertes concrets, mais la question peut également se poser pour la fourniture de la vodka Sobiewski de MBWS et des autres produits achetés aux sociétés du groupe



4. Un Acte Révélateur : Le Déréférencement de William Peel

Daniel Pichot : Les choix de gouvernance ne sont donc jamais abstraits. Ils se traduisent par des décisions opérationnelles dont les conséquences interrogent sur le respect de l’intérêt social de MBWS. Et cela ne concerne pas seulement les achats, mais aussi notamment les ventes.

David Meurisse : Pour pallier tout risque interprétatif, MBWS se refuse de considérer les produits du groupe COFEPP comme concurrents. Ainsi, par exemple, selon MBWS, les whiskies William Peel ne sont aucunement concurrents des marques Sir Edward’s et Label 5 détenues par la COFEPP. Pourtant ce n’est pas faute d’avoir demandé au CEO, au CFO de MBWS lors d’entretiens privés avec eux ou lors de la dernière AG. (extrait). Une simple enquête auprès des chefs de rayon de sept magasins nous a permis de confirmer la concurrence frontale que se livrent ces marques entre elles. Et cela est valable aussi pour la vodka Sobiesky vs Poliakov.

On assiste à un véritable déni de réalité concurrentielle. Mais il faut reconnaître que la reconnaissance de cette concurrence obligerait COFEPP à prendre des mesures drastiques de gestion des conflits d’intérêt et à modifier enfin la composition du comité d’audit et du comité stratégique. En effet, comment justifier la présence de votre principal concurrent dans votre comité d’audit pour les conventions réglementées et dans votre comité stratégique et commercial pour la détermination des politiques commerciales ?  Cet aveuglement a déjà eu des conséquences concrètes pour MBWS.

Daniel Pichot : Le cas du déréférencement de William Peel dans plusieurs enseignes de grande distribution, profite à  Label 5 et Sir Edward’s, c’est une illustration frappante. L'impact potentiel sur le chiffre d’affaires et la rentabilité de MBWS est réel comme en témoigne la déclaration du DG de MBWS : « La baisse du chiffre d’affaires du premier semestre 2025 est principalement liée à l’absence d’accord tarifaire sur notre marque de Scotch William Peel avec certains clients en France. » Le risque est que la filiale serve davantage les priorités de sa maison-mère que son propre développement, ce qui affecte mécaniquement sa valorisation boursière.



Conclusion : Gouvernance, un Levier de Valorisation Inexploité

Daniel Pichot : Chez MBWS, l’actionnaire de contrôle est par essence un initié actif, qui plus est massivement représenté au sein du Conseil d’Administration et des comités clés de MBWS. Ce qui interroge sur les potentiels problèmes de gouvernance.

David Meurisse : Le Concert MBWS estime qu’il est normal qu’un actionnaire de contrôle (La COFEPP) administre sa filiale (MBWS). Il n’en demeure pas moins qu’il est impératif que l’actionnaire de contrôle respecte la finalité sociale de sa filiale. Et cela est encore plus vrai pour une société cotée ayant fait appel public à l’épargne, qui se doit de communiquer les informations et apporter une certaine visibilité. C’est une question primordiale qui a un impact direct sur la valorisation de nos investissements. Mais face à une organisation qui utilise « le secret des affaires » comme « arme d’opacité massive », il est difficile de faire valoir l’équité entre tous les actionnaires.

Daniel Pichot : L’ASAMIS et le Concert MBWS ne demandent pas un privilège. Nous exigeons une gouvernance digne d’une société cotée. Sans un Conseil équilibré et sans un contrôle indépendant des flux intra-groupe, la décote boursière de MBWS est méritée, mais elle est surtout évitable.

David Meurisse : Les solutions existent, et elles ne coûteraient rien à l’entreprise. Accorder au Concert MBWS deux sièges au Conseil permettrait d’introduire une voix réellement indépendante dans le débat stratégique. Renforcer la proportion d’administrateurs indépendants rééquilibrerait un Conseil dominé à 80 % par la maison-mère. Publier les taux de présence au CA, comme cela a été promis, apporterait une transparence immédiate sur l’engagement réel de chaque administrateur. Enfin, créer un comité ad hoc chargé de superviser les conventions intra-groupes constituerait une garantie minimale de loyauté. Ces mesures simples se révéleraient être un signal fort envoyé aux marchés : celui d’une entreprise qui choisit la bonne gouvernance comme levier de valorisation. Est-ce un « abus de minorité » que de demander de la transparence dans ce dossier ? À défaut, le Concert MBWS utilisera tous les outils à sa disposition pour garantir que la gouvernance soit aussi transparente que possible, et nous vous assurons de notre ténacité. Dans cette optique, nous n’excluons pas une nouvelle demande d’expertise de gestion dès 2027.

Ouverture vers l’épisode 5

Ces enjeux de gouvernance ne sont pas théoriques. Ils trouvent une traduction concrète dans les choix commerciaux récents. Le déréférencement de la marque William Peel dans plusieurs enseignes de grande distribution, au profit de Label 5 et Sir Edward’s (toutes deux détenues par la COFEPP), en est l’exemple le plus frappant. Ce glissement progressif fragilise l’un des actifs stratégiques de MBWS et alimente le doute sur l’impartialité des décisions prises par ses organes de gouvernance. C’est ce basculement silencieux, porteur d’un risque majeur de transfert de valeur, que nous analyserons dans le prochain épisode.

Tags: